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Où sont passés les grands stratèges ?
Page 4: Du skill à l'état brut
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Parce que de plus en plus, les équipes préfèrent avoir cinq joueurs extrêmement bons, capables de sortir 30 kills par map, quitte à sacrifier un peu de vision de jeu. Aujourd'hui, ce qui fera gagner un match, ce seront des kills, des clutchs, des actions incroyables. Ce ne seront plus que rarement des coups stratégiques ou tactiques qui déstabiliseront l'adversaire.
Évidemment, cela ne veut pas dire que toute stratégie a disparu : chaque équipe possède des plans précis sur chaque map, que ce soit des CPL, des prises ou des agressions de zones. Mais ce qui fera vraiment la différence, ce n'est plus la smoke qui bouche la vision du CT. Cette smoke, elle est vue et revue, et le CT sait très bien qu'en montant sur ce baril à côté, il pourra voir par-dessus. Non, ce qui fera la différence, ce sera lequel des deux joueurs, de l'attaquant ou du défenseur, sera le premier à tuer son adversaire. Est-ce que le terro attendra que le CT monte sur son baril, le viseur prêt à cet endroit, pour le dégommer ? Est-ce que le CT sera assez patient pour avoir un bon timing et tuer le terro alors que celui-ci s'avance bombe en main ? On parle alors de tactique et de décision individuelle, propre aux capacités et à l'expérience de chacun. On parle alors de skill personnel.
Rifles, AWP, pistols : olofmeister est l'exemple-type du joueur archi-skillé avec tous les types d'armes
Dans l'évolution même de la manière de jouer des équipes, on peut voir ce changement, avant même que la stratégie finale ne soit décidée, que l'assaut ne soit lancé. Par exemple, on voit de plus en plus de binômes, les équipes travaillant en 2-2-1 : deux duos de joueurs avançant ensemble pour se couvrir mutuellement, et un lurker laissé seul. Et si un duo ou un joueur fait la différence, toute l'équipe suivra alors là où il a ouvert la voie.
Le jeu collectif dirigé par un lig n'a pas disparu, il s'est simplement adapté à CS:GO. Le besoin d'avoir cinq joueurs très forts, capables à tout instant de pouvoir faire un revenge ou de prendre un double kill a pris une place prépondérante. Evidemment, la notion de skill n’est pas nouvelle, et il a toujours fallu qu’une équipe en possède pour s’imposer. Néanmoins, elle semble avoir été poussé à son paroxysme sur le dernier opus de Valve.
C'est là que l'on peut retrouver notre point de départ : le leader, à qui l'on pouvait "pardonner" le fait qu'il fasse moins de frags car il apportait une vraie plus-value stratégique, doit maintenant lui aussi être capable d'être en haut du scoreboard. Il faut cinq joueurs bons, pas quatre plus un. C'est ce qui a coûté leur place à des joueurs comme sgares ou gob b.
Comme le leader doit maintenant aussi être capable de carry son équipe si besoin, le rôle atterrit souvent dans les mains d'un joueur réputé à la fois fort, et intelligent. Du moins assez pour être capable de reprendre ce rôle. La charge de lead ne fera, au pire, qu'atténuer un peu le nombre de frags qu'il est capable de sortir. On peut penser à flusha pour fnatic ou à rain, qui avait eu ce rôle pendant un temps chez Gamers2.
Nouveau rôle pour flusha
C'est ainsi que les leaders actuels sont plus des "callers" que des "masters", pour reprendre les termes qu’aks avait utilisé dans son dossier sur les leaders-in-game : ils laissent beaucoup de liberté à tous leurs joueurs dans une zone donnée, et ajustent le jeu et les directives en fonction des actions et informations de chacun. Et le leader aussi se doit de faire partie de ce "chacun" : lui aussi doit être capable de créer la différence individuellement. Il n'y a donc presque plus de côté "master", où le lig dictait une stratégie précise avant chaque début de round, dans laquelle chaque joueur avait un rôle et des consignes particulières données, voire imposées. Un tel style de jeu n'est plus possible sur cette version de Counter-Strike.
Le stuff est moins certain, on mise donc sur le skill des joueurs. Sauf que… Eh bien, ça non plus, ce n'est pas une valeur sûre. Maintenir un niveau de jeu très élevé sur une longue période est extrêmement compliqué, même pour un professionnel. Surtout pour un professionnel, vu comment il est scruté et analysé à chacun de ses matchs. Et même si pour une équipe cette incertitude peut être divisée par cinq, soit le nombre de joueurs, CS:GO semble aussi être devenu de plus en plus basé sur la force du moment. Une équipe très forte à un instant T pourra gagner une lan alors que personne ne l'attendait. Et puis sa forme baissera, et elle ne gagnera plus rien ou presque. Alors bien sûr, cela reste rare et fait aussi partie du charme de CS, le petit qui mange le gros. Mais tout de même, au vu des performances surprenantes qui semblaient se répéter fin 2015 (Na'Vi et Gamers2 à la DH Cluj, Luminosity aux finales FACEIT S3…) et continuent même en ce début d'année avec Dignitas par exemple, la question peut se poser : CS est-il devenu un jeu "momentum-based", basé uniquement sur la forme du moment ?
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