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Le baromètre de la scène française - Été 2023
Le dernier ! Le dernier baromètre qui parle exclusivement de CS:GO. Ça ne signifie pas que le prochain n’en parlera pas, il reste toujours Cologne, et on doute que, du jour au lendemain, toutes les compétitions passent sur CS2. Toujours est-il qu’à la fin de 2023, on devrait être solidement entrés dans l’ère CS2. On aurait aimé clore ce chapitre en beauté mais, malheureusement, la réalité est plus contrastée.
Vitality, enfin la consécration
Cinq ans qu’ils courraient après. Cinq ans de changements, de succès, de déceptions, de paris et de critiques, pour en arriver là. On va être honnêtes, à la fin de l’année 2022, plus grand monde ne pensait que Vitality gagnerait enfin un Major sur CS:GO. Son pic semblait si loin, et le pari international en passe d’être raté alors que le Major à domicile se profilait.
Début 2023, on décerne un peu de mieux, mais l’équipe est loin d’être impériale. Pour sa première sortie, elle finit première de sa poule aux BLAST Premier Spring, s’offrant notamment une victoire de prestige contre Heroic. À Katowice, Vitality n’est pas ridicule mais doit se contenter d’un top 5/6, battue en quarts par Team Liquid après un comeback terrible des Américains sur Overpass.
Pour beaucoup, c’est la Pro League qui a lancé Vitality vers les sommets. Pourtant, elle y finit sur un top 8, sans gloire, encore une fois sortie en quart, par ENCE. Lors de la phase de poules, dupreeh dut se faire remplacer pour des raisons familiales. Pour combler ce rôle d’entry, la structure française ne va pas chercher loin et appelle ce bon vieux JACKZ, sans équipe à ce moment. Et là, comme par magie, le cinq a commencé à bien jouer. Comme si l’ancien G2 constituait la pièce manquante.
Ce qu’il fallait comprendre, ce n’est pas que Vitality avait besoin de JACKZ, mais qu’elle avait besoin de quelqu’un capable de faire ce que JACKZ faisait. Et il faut croire que dupreeh était devant sa télévision, parce que c’est un Danois transfiguré qui est revenu de son court congé paternité.
On les aura beaucoup critiqués mais il faut reconnaitre que les Danois ont su répondre présent au moment le plus important
Premier tour de chauffe au RMR, où les hommes d’apEX finissent en 3-1 et arrachent un slot Légende en battant G2 et la surprise Monte. Un soulagement qui va libérer mentalement le cinq, désormais bien lancé. Il confirme aux IEM Rio, un événement étrange calé entre le RMR et le Major, qui va servir de galop d’essai pour pas mal d’équipes.
Les abeilles se font peur en perdant contre OG en ouverture mais se rattrapent en sortant les locaux de MIBR. Elles enchaînent alors un sacré parcours en sortant successivement FaZe, OG, BIG, C9 et Heroic pour décrocher leur premier titre depuis 2021, garantissant à apEX un record unique : seul joueur à avoir décroché un grand titre chaque année depuis 2013.
Derrière, on ne va pas revenir sur l’histoire, on sait déjà à quel point elle est belle. Vitality arrive à Paris en pleine bourre, bénéficie des nombreuses surprises pour s’assurer un bracket pas très clinquant et finit par remporter le Major, son Major. Et c’est tout ce qui compte. L’histoire oubliera bien assez vite que c’était probablement le parcours le moins prestigieux de l’histoire des Majors. À la fin, l’important, c’est la ligne sur le palmarès.
Le trophée est moche mais la victoire est belle.
Le joueur de cette première partie de saison : Matthieu "ZywOo" Herbaut
Qui d’autre ? En 2023, ZywOo est le meilleur joueur du monde. Oubliez s1mple, sh1ro, NiKo ou device, il n’y a qu’un roi, et il domine la planète en se marrant. Une bonne humeur certainement due au fait qu’il n’est plus le seul à tuer les mecs d’en face. On l’a même souvent vu céder sa place à Spinx, Magisk et dupreeh sous le feu des projecteurs. Mais même lorsqu’il n’est plus sur le devant de la scène, ZywOo continue de dominer outrageusement et de battre record après record. Une légende, tout simplement.
Falcons quitte la France
On ne va pas se mentir, on se demandait un petit peu pourquoi des riches saoudiens misaient sur la scène française. On ne s’en plaignait pas, mais on doutait que ça dure longtemps. Pas besoin de revenir sur l’ensemble des compétitions depuis le début de l’année puisque, de toute façon, l’objectif était clair : être la seule équipe 100 % française au Major de Paris.
Grâce à leur ranking, les coéquipiers de NBK se permettent d’éviter la boucherie des qualifications ouvertes et rentrent directement dans l'étape fermée. Sans être brillante, l’équipe se qualifie aisément, en ne perdant qu’un seul match contre Apeks, future demi-finaliste du Major (on a beau l’écrire, on peine à y croire). Falcons est au RMR, la moindre des choses vu le calibre des joueurs alignés.
NBK en lead in-game, c'est toujours pas vraiment ça
Sauf que le RMR, c’est là que les choses sérieuses commencent. Un peu trop sérieuses pour Falcons, qui échoue aux portes de la qualification. Ca avait pourtant bien commencé avec deux victoires contre Sprout et MOUZ et une défaite face à NAVI. En 2-1, l’équipe n’a besoin que d’une petite victoire pour rejoindre le vrai Major. Hélas, mille fois hélas, Falcons n’arrive pas à convertir contre GamerLegion, future finaliste (hihi), et, surtout, contre des OG pourtant faiblards.
La qualification de la dernière chance ne lui sera pas plus tendre, puisqu'elle en sorte sèchement contre BIG. Une fin sans gloire pour un roster qui aura régulièrement flirté avec le top 30 sans jamais s’affirmer comme un tag solide du Tier 2. Ça en était probablement trop pour nos pétromonarques favoris qui décident de faire rapidement le ménage. Exit misutaaa, kennyS et Python, bienvenue BOROS, mhL et et lauNX, avec bodyy et NBK pour encadrer tout ça. On ne sait pas si ça va marcher mais une chose est sûre : ça va mettre des bouches.
Le joueur de cette première partie de saison : Alexandre "bodyy" Piannaro
Le starplayer de cette équipe, le meilleur joueur français derrière ZywOo. Plus encore que les autres, certainement celui qui méritait le plus de voir Paris. Mais, encore une fois, il échoue dans ces cruels RMR qui ont déjà ruiné tant de fois les espoirs de ses précédentes équipes. Plus que de l’injustice, il y aurait presque de la colère cette fois-ci : est-ce qu’on ne pouvait pas trouver mieux qu’un kennyS dépassé, un Python modèle couleuvre et un misutaaa aux abonnés absents pour accompagner notre bodyy national et lui offrir enfin cette participation au Major qu’il mérite tant ?
SAVE THIS MAN
La scène française boit la tasse
Disons-le tout de suite : la victoire de Vitality est l’arbre qui cache la forêt. Ou plutôt l’oasis qui cache le désert ? De fait, rien ne sert de revenir, comme d’habitude, sur chaque équipe, puisque la plupart n’existent même plus ou ne sont plus majoritairement françaises. Crise de la scène, crise économique, crise du jeu, appelez ça comme vous voulez, les faits sont simples : à quelques exceptions, notre scène est en état de mort cérébrale.
Commençons avec HEET. Englué dans des problèmes financiers, le club n’a pas payé ce qu’il devait pendant des mois, terminant piteusement ce qui avait commencé comme une belle histoire. C’était pas faute d’avoir prévenu concernant le pedigree du PDG. Les joueurs (Maka/hAdji/Ex3rcice/Lucky/Djoko) sont maintenant sous le tag "Looking4Org" et visent une place dans le top 30 pour espérer convaincre quelqu’un de sortir le chéquier.
Nouveau tag pour les ex-LDLC OL qui évoluent désormais sous les couleurs du Pôle Emploi
On parle de LDLC OL ? Pilier de la scène française depuis les années 2000, la structure avait toujours parié sur le drapeau tricolore, y compris lorsque ça allait moins bien. On avait tout connu ensemble, les hangars sur Source, les victoires en Major, le T2, les projets éclatés, les annonces excitantes, c’était le club sur lequel on pouvait compter. Ça aussi, c’est fini. D’un coup d’un seul, des légendes comme AMANEK et des jeunes prometteurs comme Graviti se retrouvent sur le carreau, sans structure et sans salaire.
Côté GenOne, ce n’est pas beaucoup plus reluisant. Après une lune de miel comme la France sait nous en réserver, l’équipe s’est écroulée. Incapable de mettre un pied devant l’autre malgré les noms et les divers changements, le cinq est remercié par krL qui décide de se recentrer sur son projet académie. Un retour aux sources pour la structure qui n’aura pas réussi à franchir un nouveau palier après le succès des GenOne originels.
Un roster prometteur qui sera retombé aussi vite qu'il était monté
Arcadia vous dites ? C’est vrai que, sur le papier, ça avait l’air sympa. Une structure toute neuve pour les potes d’unshaark après leur belle perf' lors de la qualification ouverte du Major, avec des salaires et des locaux dans la Creuse. Sauf que depuis, pas vraiment de nouvelles, si ce ne sont les bruits qui courrent selon lesquels les joueurs seraient actuellement en train de négocier des ruptures de contrat pour retard de paiement. Super.
On pourrait aussi parler des lans qui ont du mal à se remplir, des compétitions online avec cashprize qui sont annulées faute de participants, bref, c’est la merde. Et pour une fois, même dans ces modestes pages où l’optimisme tend parfois à la naïveté lorsqu’on parle du subtop français, là, on peine à voir le bout du tunnel.
Alors que le Major de Paris vient de démontrer qu’avec un peu de malice, il était possible de faire des choses immenses à l’international, qui voudra mettre ses billes en France, sur une scène qui peine à maintenir de façon constante plus de deux équipes en ESEA Advanced ? Sur une scène où de plus en plus d’acteurs de premier plan décrivent une mentalité défaillante ?
C’est tout le paradoxe de cette fin de cycle sur CS:GO. Pendant que s’éteint un jeu où la France aura été une des meilleures nations, et que le dernier Major a été gagné par une structure hexagonale, notre scène nationale, elle, est au plus bas. Jamais notre subtop n’a été aussi faible, jamais aussi peu d’équipes et de tag reconnaissables n’ont peuplé nos lans, jamais le pool de joueurs n’a été aussi peu prometteur. Alors on va croiser les doigts et mettre toutes nos billes sur CS2, en espérant qu’un renouveau du jeu apporte un peu de fraîcheur par chez nous. Sinon, va falloir se mettre à l’hébreu.