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10 ans de CS:GO : 10 grandes victoires
Dans le tableur Excel répertoriant toutes les lans internationales significatives ayant eu lieu depuis le début de CS:GO (oui, on a réellement un document comme ça), on atteint, après une décennie, 257 tournois. Peut-être qu'il en manque quelques-uns, oubliés par inadvertance, mais le très gros est là. 257 lans et donc 257 victoires, des plus prestigieuses aux plus modestes, des plus impressionnantes aux plus oubliables, des plus émouvantes aux plus sobres.
Parmi ces 257, dix sont détaillées dans l'article qui suit. Beaucoup ont eu lieu en Major, parce que c'est surtout dans les tournois de Valve que s'écrit la grande histoire de Counter-Strike. Dix victoires passées à la postérité, qui ont marqué leurs acteurs et les supporters. Dix condensés de la plus belle émotion ressentie par ces joueurs s'escrimant à atteindre le plus haut niveau de jeu possible et qui sont parfois, tout de même, récompensés.
Cliquez sur l'image de chaque victoire pour connaître les détails.
Astralis à l'ELEAGUE Atlanta Major 2017 |
FaZe Clan au PGL Major Antwerp 2022 |
Cloud9 à l'ELEAGUE Boston Major 2018 |
Virtus.pro aux EMS One Katowice 2014 |
NAVI au PGL Major Stockholm 2021 |
Ninjas in Pyjamas à l'ESL One Cologne 2014 |
fnatic à la DreamHack Winter 2013 |
Astralis au StarLadder Major Berlin 2019 |
Gambit au PGL Major Krakow 2017 |
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Virtus.pro aux Finales SLTV StarSeries V |
Astralis à l'ELEAGUE Atlanta Major 2017
Si l’on retient surtout les trois Majors gagnés consécutivement par Astralis en 2018 et 2019, c’est bien son premier titre, un an et demi plus tôt, qui a tout déclenché. Pour la première fois de son histoire, l’équipe danoise n’a pas failli dans un tournoi où elle arrivait avec une pancarte de favorite accrochée dans le dos. Jusque-là toujours éliminé en quarts (cinq fois) ou en demi-finale (quatre fois) de Major, alors qu’on le voyait parfois aller plus loin, le trio dupreeh - device - Xyp9x allait enfin connaître son heure de gloire. Il faut dire que l’arrivée au lead de gla1ve et le recrutement de Kjaerbye lors des mois précédents apportaient deux atouts précieux.
Cet ELEAGUE Major ne fut pas une promenade de santé pour Astralis, qui allait se retrouver dans des situations périlleuses à de multiples reprises. Mais la formation ne craqua jamais. Elle survécut au match de la mort face à Liquid à 2-2 en ronde suisse. À un clutch raté de Xyp9x sur le dernier round de la deuxième map du quart de finale contre NAVI, qui emmena tout le monde sur une carte décisive potentiellement fatale. À la ninja defuse d’olofmeister sur le trentième round de Cache, premier terrain de jeu face à fnatic en demi-finale, qui sera vite oubliée quelques minutes plus tard lorsque Astralis l’emportera en overtime.
Et enfin au boss final, Virtus.pro, des Polonais tout ce qu’il y a de plus confiants et expérimentés, qui gagnèrent la première map de la finale et se permirent ensuite de mener 13-7 en défense sur Train, ultime carte de l’affrontement. Un miraculeux round remporté grâce aux Tec-9 et au 1vs1 le plus important jamais gagné par Xyp9x relança Astralis. Vingt minutes plus tard, après une démonstration offensive, les deux adversaires pleuraient, pas pour les mêmes raisons.
Cette finale, l’une des plus belles de l’histoire des Majors, symbolise bien toutes les galères qu’ont traversé les Danois avant de connaître la consécration suprême. Comme s’il fallait à tout prix en passer par là une dernière fois pour exorciser les vieux démons. Astralis ne dominera pas le monde tout de suite pour autant. Il faudra attendre encore une bonne année et un remplacement, celui de Kjaerbye par Magisk. Mais avec ce triomphe, l’équipe laissait définitivement derrière elle son image de perdante en Major.
Le parcours d'Astralis (dupreeh, device, Xyp9x, Kjaerbye, gla1ve) Ronde suisse :
Quart de finale :
Demi-finale :
Finale :
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FaZe Clan au PGL Major Antwerp 2022
Ils sont là depuis des années. Ils rôdent près des annonces de transfert, se manifestent à chaque belle sortie de leurs formations favorites. Et ce 22 mai 2022, qui a vu le sacre de FaZe Clan au PGL Major Antwerp, est devenu leur nouveau jour fétiche. Eux, ce sont les défenseurs des équipes internationales – rassemblant des joueurs de plusieurs nationalités ne partageant pas la même langue natale –, qui rabâchent leur doctrine depuis qu’ils ont eu une révélation : "les équipes internationales, c’est l’avenir de Counter-Strike !"
Jusqu’alors, ils étaient rarement bien accueillis par le reste de la communauté. Il faut dire que leur argumentaire était assez pauvre : certes, FaZe, MOUZ ou G2 avaient eu leurs heures de gloire, mais n’avaient jamais soulevé de Major, la catégorie reine quand il s’agit de parler sérieusement. Et puis le sempiternel "ça marche bien sur LoL ou Dota, alors sur CS aussi !" est un peu agaçant à entendre à force, surtout lorsqu’on a répété à de multiples reprises que la communication dans un FPS hyper-réactif et dans un MOBA n’a pas grand-chose à voir.
Mais voilà, au PGL Major Antwerp, FaZe a donc triomphé, devenant la première équipe internationale de l’histoire de Counter-Strike à remporter un Major. Une victoire logique tant le cinq arrivait en Belgique avec le statut de favori suite à ses top 1 aux IEM Katowice et à l’ESL Pro League S15 les mois précédents. Une victoire symbolique pour karrigan et rain, seuls rescapés de l’échec de l’ELEAGUE Boston Major 2018, pour ropz et broky, étendards d’une nouvelle génération qui a grandi et appris sur FACEIT, et pour Twistzz, qui a changé de continent pour rebondir après la fin de son aventure chez Liquid.
Une victoire belle, tout simplement, acquise après un parcours pas si évident que ça, entre une map concédée à NiP en quart, un triple overtime contre Spirit en demie et une frayeur si grande sur la première carte de la finale, lorsque NAVI remonta des enfers en attaque mais échoua à convertir ses deux rounds de 1-0. "C’est Counter-Strike les gars ! On aime ça ! Je voulais juste leur montrer 'l’anti-choke'", lâchera sur TeamSpeak un karrigan tellement plus confiant que quatre ans plus tôt, lorsqu’il n'avait pas été capable de trouver la solution contre Cloud9 à Boston.
À Anvers, FaZe Clan a donc fait entrer les Majors de CS:GO dans l’ère cosmopolite en combinant cinq drapeaux différents à l’heure de sa consécration. Une première et probablement pas une dernière, même si bien malin sera celui qui pourra dire quand une telle performance aura à nouveau lieu, et qui la réalisera. Mais ça à la rigueur, qu’importe : maintenant qu’un Major est tombé dans l’escarcelle des équipes internationales, leurs militants vont avoir du répondant pour un bon moment.
Le parcours de FaZe Clan (rain, broky, karrigan, Twistzz, ropz) Ronde suisse (Legends Stage) :
Quart de finale :
Demi-finale :
Finale :
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Cloud9 à l'ELEAGUE Boston Major 2018
Si Hollywood l’avait écrit, on aurait trouvé ça trop cliché. "Trop américain". Un héros à l’agonie qui se relève et terrasse tous ses ennemis, en finissant par vaincre son némésis devant une foule scandant son nom, même Tom Cruise n’aurait pas signé. Et pourtant, c’est bien ce que Cloud9 a accompli à l’ELEAGUE Boston Major 2018, sans qu’aucun scénariste ne vienne mettre son nez là-dedans.
Cloud9 n’a jamais brillé en Major. Avant l’exploit de Boston, l’organisation restait sur six éliminations consécutives en poules. Sur son sol, c’était encore pire : 12 petits rounds marqués à la MLG Colombus 2016 en deux matchs, et un échec à la qualification pour l’ELEAGUE Atlanta Major 2017. Un traumatisme. Alors si le public local est évidemment ravi d’accueillir un nouvel événement de ce genre, pas grand-monde ne parie sur C9. Les principaux concernés, eux, sont confiants. "Je veux aller chercher le titre, je veux gagner le Major", lance tarik lors du Challengers Stage. On le regarde alors en souriant, comme un enfant à qui l’on promet que oui, il sera astronaute. Mais le futur MVP de l’événement n’a plus cinq ans, sait leader et coller de gros headshots. Grande différence avec le petit neveu.
Ça se passe d’abord bien, 3-0 en Challengers Stage. Puis très mal, 0-2 en Legends Stage. Là, le film démarre. L’ELEAGUE crie "Action !" et C9 passe en mode Daniel Day-Lewis. L’équipe enchaîne des succès contre Virtus.pro, Astralis et Vega Squadron en n’encaissant pas plus de sept rounds à chaque fois. Qualifiée pour les quarts de finale, elle transforme le choc contre G2 en un soufflé indigeste pour les Français, 16-08 / 16-07. Une map est lâchée en demie contre SK, histoire de, mais pas de quoi recracher son pop-corn.
Le climax arrive lors de la finale contre FaZe Clan, bête noire de Cloud9, victorieuse des huit dernières cartes jouées entre les deux. Mais ce soir-là à Boston, les rôles s’inversent. La tête d’affiche devient le faire-valoir d’un collectif décidé à lui piquer la vedette. FaZe arrive encore à se maintenir sur le devant de la scène sur Mirage, 16-14, puis se retrouve en retrait sur Overpass, 10-16, et Inferno, 19-22. Une dernière map complètement folle où Cloud9 sauve quatre rounds de match, FaZe trois, avant que les Européens ne craquent les premiers en prolongations.
Devant un public probablement tout crampé à force de rester debout, Cloud9 offre aux États-Unis son premier Major et remet au centre des débats une scène si souvent décriée. Il faut espérer que celle qui était alors la meilleure line-up de l’histoire du pays sur CS:GO, en attendant Liquid 2019, aura bien profité de ce moment : elle ne survivra pas deux mois de plus, payant le contrecoup de son exploit. Le début d’une longue traversée du désert pour C9, qui restera pourtant à jamais dans le coeur des Américains pour ce Major et cette finale de barjots.
Le parcours de Cloud9 (Skadoodle, Stewie2K, autimatic, tarik, RUSH) Ronde suisse (Challengers Stage) :
Ronde suisse (Legends Stage) :
Quart de finale :
Demi-finale :
Finale :
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Virtus.pro aux EMS One Katowice 2014
Celui-là ne pouvait pas leur échapper. Légendes de Counter-Strike, TaZ, NEO et pasha ont gagné des Majors aux quatre coins du monde sur 1.6 : en Italie, en Allemagne, en France, aux États-Unis, en Chine, en Corée du Sud. Mais jamais chez eux, en Pologne, pays oublié par les organisateurs. Jusqu’en ce mois de mars 2014. Le deuxième Major de CS:GO a lieu à Katowice. Ça tombe bien, l’escouade polonaise, composée du trio de vétérans complété par la doublette Snax - byali, monte en puissance sur ce nouvel opus. Elle vient tout juste d’être recrutée par Virtus.pro et elle sait qu’elle tient là une chance peut-être unique de briller devant famille, amis et proches, de triompher sous les applaudissements de ses supporters. Son envie de gagner est immense.
Cette motivation va se transférer sur le serveur. Avant même le début du tournoi, Virtus.pro impressionne tous ses adversaires en prac’. Si les parieurs hypothèquent leur maison sur NiP et Titan, les participants au Major sentent que les Polonais préparent un très gros coup et qu’il vaudrait mieux ne pas tomber contre eux trop tôt.
Les qualifications tranquillement passées, VP se fixe son nouvel objectif : sortir des poules pour atteindre la Spodek Arena et faire face à son public. Il lui faudra un match pour se mettre en jambes, un overtime contre HellRaisers pour faire chauffer la machine. Titan est ensuite facilement écartée 16-05. Les groupes sont franchis. Le show peut commencer.
Dans l’arène, Virtus.pro humilie LDLC : 15-00 en attaque sur Mirage, 13-02 en défense sur Inferno. Scores finaux, 16-03 / 16-08. En demi-finale, LGB fait de la résistance et arrache Mirage, 19-17, mais doit s’incliner sur Inferno et Train. La Pologne attend ses héros en finale. Ils ne vont pas décevoir : portée par un pasha très incisif au sniper et un Snax au sommet de son art (+30 de K/D, deuxième meilleure performance jamais réalisée en finale de Major derrière les +31 de s1mple au PGL Major Stockholm 2021), la formation locale roule sur des NiP qui n’en avaient pas tant demandé, 16-09 / 16-10. Les ninjas en sont presque réduits à faire de la figuration alors que leurs opposants vivent le plus beau jour de leur carrière.
Ce succès marqua le début de l'odyssée Virtus.pro. Une équipe qui gagna beaucoup et perdit encore plus. Un cinq mythique, resté ensemble près de quatre ans et demi, une longévité absurde dans le monde de l’esport. Et qui, en ce mois de mars 2014, prouva à ESL que Katowice était un très bon choix pour accueillir du Counter-Strike.
Le parcours de Virtus.pro (TAZ, NEO, pasha, Snax, byali) Phase de poules :
Quart de finale :
Demi-finale :
Finale :
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NAVI au PGL Major Stockholm 2021
Après trois éditions remportées par Astralis et trois autres annulées par le Covid-19, qui allait s’accaparer le premier Major post-pandémie ? La réponse semblait toute trouvée : NAVI. C’était enfin le bon moment pour une structure qui avait déjà échoué trois fois en finale du plus grand des tournois (DH Cluj-Napoca 2015 contre EnVyUs, MLG Colombus 2016 contre Luminosity, FACEIT Major London 2018 contre Astralis), et pour un joueur hors-normes, s1mple, qui courait après son Major depuis tant d’années. Meilleure équipe de la saison, NAVI ne pouvait pas laisser échapper ce titre.
Et en effet, à Stockholm, l’armada de l’Est ne trembla pas. Elle entra même un peu plus dans l’histoire en devenant la première formation à boucler un Major sans perdre une seule carte, performance que mêmes les grands Astralis n’avaient pas accompli. Attendus par la communauté tout entière, les NAVI se montrèrent plus qu’à la hauteur, tant collectivement qu’individuellement. s1mple fit du s1mple, electronic fit du electronic, et l’on découvrit aussi que b1t pouvait faire du b1t tant le rookie impressionna pour son premier événement du genre.
Le parcours jusqu’à la coupe ne fut pas simple : il fallut écarter Heroic, Virtus.pro et NiP lors de la ronde suisse, puis Vitality, Gambit et G2 en play-offs. Un dernier combattant qui fit tout pour piquer ne serait-ce qu’une carte à son adversaire, mais NAVI sauva cinq rounds de map sur Nuke pour garder son invincibilité et se hisser sur la pointe des pieds sur la photo des vainqueurs de Major, afin d'être quelques centimètres au-dessus des autres.
Rarement, jamais même depuis 2016 et la victoire à l’ESL One New York, on avait vu s1mple aussi expressif après la fin d’un match. Le meilleur joueur de l’histoire de CS:GO a appris au fil des années que dans un jeu collectif, le palmarès compte au moins autant que les statistiques individuelles. Ses Top 1 HLTV auraient été très beaux sans Major mais avec, ils brillent d’autant plus. En espérant que d’autres talents tout aussi méritants finissent eux aussi par connaître le bonheur total.
Le parcours de NAVI (s1mple, electronic, Perfecto, Boombl4, b1t) Ronde suisse (Legends Stage) :
Quart de finale :
Demi-finale :
Finale :
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Ninjas in Pyjamas à l'ESL One Cologne 2014
On ne se lasse pas de raconter la victoire de Ninjas in Pyjamas à l’ESL One Cologne 2014. Un succès improbable, qui n’aurait jamais dû arriver. Un titre gagné à coups d’exploits individuels, de clutchs sortis au meilleur moment possible, de rounds grattés les uns après les autres, sans sérénité ni filet de sécurité. L’ultime prouesse d’un cinq qui avait tant marqué l’histoire mais arrivait en bout de course.
Souveraine lors des deux premiers Majors, NiP allait pourtant les perdre en finale, contre des adversaires qu’elle avait sûrement sous-estimés (fnatic à la DH Winter 2013) ou dont elle avait mal mesuré la surmotivation (Virtus.pro à Katowice 2014). Mais à Cologne, la donne est différente. Les ninjas n’arrivent plus entourés d’un halo dominant. Leur incroyable série de trente top 4 consécutifs en lan s’est arrêtée deux mois plus tôt aux Finales ESEA XVI. La Gfinity 3 a ensuite tourné au cauchemar avec trois défaites en poules et une fessée contre Dignitas en quart, 04-16 / 11-16. NiP ne fait plus peur. Fifflaren est de plus en plus critiqué, Xizt et friberg inquiètent par leur inconstance.
Oui mais voilà, un Major, c’est toujours spécial. C’est là que les grandes équipes s’exposent réellement. Et NiP était une très grande équipe. Elle va faire le dos rond pour franchir les poules, encaissant un rude 06-16 contre Epsilon avant de déjouer le piège HellRaisers. Se mettre à nouveau en boule pour résister aux assauts de Cloud9 en quart de finale et crucifier les Américains de deux 16-14. Et se retrancher une fois de plus afin de survivre à la tempête LDLC, vaincue elle aussi 16-14 sur la troisième carte de leur demie.
De retour en finale, NiP y retrouve son meilleur ennemi fnatic. La revanche de la DH Winter 2013. Cette fois, plus de timidité : les dix Suédois se connaissent par coeur et se knifent sans pitié dès le premier gun round. Contrairement au reste du tournoi, les ninjas cessent de subir et imposent leur rythme en défense, d’abord sur Cobblestone puis sur Inferno, où ils perturbent l'attaque ennemie. Au 29ème round de la dernière map de ce Major, ils mettent la touche finale à leur si difficile ouvrage. Encore aujourd'hui, NiP reste la seule équipe à avoir triomphé en Major en ayant gagné ses trois matchs de play-offs sur le score de 2-1.
Il aurait été injuste que cette line-up Ninjas in Pyjamas ne gagne pas de Major tant elle eut une influence colossale sur CS:GO. Alors oui, ce n’était bien qu’une parenthèse enchantée avant la mise à l’écart de Fifflaren, qui s’imposait inévitablement tant l’ancien Sourceux était un ton en dessous des autres. Mais même cette suite un peu mélancolique ne suffit pas à enlaidir ces quatre jours figés dans le temps, symboles d’une époque où la NiP Magic était plus vivante que jamais.
Le parcours de Ninjas in Pyjamas (friberg, f0rest, Xizt, Fifflaren, GeT_RiGhT) Phase de poules :
Quart de finale :
Demi-finale :
Finale :
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fnatic à la DreamHack Winter 2013
À jamais les premiers. JW, flusha, pronax, Devilwalk et schneider, sous les couleurs de fnatic, ont remporté le premier Major de l’histoire de CS:GO, et le premier Major de l’histoire de Counter-Strike directement soutenu par Valve. Grâce aux profits réalisés par les caisses de skins lancées l'été précédent, l’éditeur du jeu injecta 250 000 $ dans le tournoi, une somme aujourd’hui "banale" mais colossale pour l’époque. Avant cette compétition, le cashprize le plus élevé depuis le début de Global Offensive se montait à seulement 45 000 $, pour la DH Winter 2012. À l’échelle encore plus générale de l’existence de CS, seules les deux saisons des CGS, en 2007 et 2008 sur CS:S, avaient réussi à proposer davantage d’argent.
Bref, l’événement est hors normes. Tout le monde veut en être. Le gagnant assure sa postérité pour l’éternité. "À ce moment-là, on pensait qu’il n’y aurait qu’un Major, c’était vraiment exceptionnel", se souvient Ex6TenZ. Ses VeryGames, qui luttent pour le trône mondial, font partie des favoris au titre, aux côtés de Ninjas in Pyjamas qui ont même annulé leur participation à certains événements pour se préparer en sous-marin. Derrière, entre Astana Dragons, Universal Soldiers, CPH Wolves et iBUYPOWER, une floppée d’outsiders joue des coudes.
Et fnatic dans tout ça ? fnatic se fait discrète. Elle vient de recruter son nouveau leader, pronax, trois semaines plus tôt. Délai un peu court pour bien figurer à la DreamHack, pensent les analystes. Quelle naïveté. pronax est un génie. JW en train de devenir l’un des meilleurs snipers du monde. schneider et flusha des rifles de grand talent. Devilwalk un coéquipier modèle. La fine équipe est prête à sortir le tournoi d’une vie.
fnatic va maîtriser cette DH Winter. Deux bo1 presque trop faciles en poule, un quart de finale accroché mais finalement remporté face à Recursive, une rouste pour Complexity en demie et une tape derrière la tête de ninjas bien trop confiants en finale, qui se firent remonter sur Dust2 puis humilier sur Train. Le Major est dans la poche. Personne ne s’y attendait. Cinq Suédois viennent de braquer l’histoire de CS:GO.
Cette line-up ne gagnera rien d’autre, si ce n’est le championnat suédois huit mois plus tard. La victoire à la DH Winter 2013 apparaît encore aujourd’hui comme un quasi one shot pour fnatic, un exploit venu d’on ne sait où. L’organisation devra attendre le recrutement de KRIMZ et d’olofmeister à l’été 2014, à la place de Devilwalk et schneider, pour retrouver les premiers rôles.
Le parcours de fnatic (JW, flusha, schneider, Devilwalk, pronax) Phase de poules :
Quart de finale :
Demi-finale :
Finale :
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Astralis au StarLadder Major Berlin 2019
En remportant le StarLadder Major Berlin 2019, Astralis est devenue la seule équipe à s’imposer lors de trois Majors consécutifs sur CS:GO. C’est un peu pour ça que cette victoire figure dans cet article. Mais c’est surtout pour la manière dont les Danois ont conquis ce troisième titre qu’elle a été retenue. Lors du premier sacre, à Londres en 2018, Astralis installait son ère de totale domination. Lors du deuxième, à Katowice début 2019, personne n’arrivait à sa cheville. En revanche, avant ce troisième, des doutes étaient apparus : le printemps n’avait pas été très joyeux et en arrivant dans la capitale allemande, Astralis n’avait plus gagné de lan depuis six mois, laissant la place de numéro 1 mondiale à Liquid.
À Berlin, la meilleure équipe de l’histoire allait remettre les pendules à l’heure. Ce ne fut clairement pas une promenade de santé : en deux jours de ronde suisse, Astralis perdit un 28-31 contre NRG et un 29-31 contre CR4ZY. Deux matchs fous qui ne l’empêchèrent pas de se qualifier sans trop trembler pour les play-offs.
Là, dans l’arène, une véritable leçon fut donnée. Plus les tours passaient, plus Astralis redevenait l’ogre qui donnait des cauchemars à toute la scène. Favorite du Major après son incroyable première moitié de saison, Liquid fut balayée 2-0, quasiment battue dès les vétos par un pick Vertigo qui surprit tout le monde. Outsider sérieux au titre et sortie vainqueur d’une première confrontation quelques jours plus tôt, NRG ne put plus rien faire en demi-finale. Invitée surprise du dernier dimanche de la compétition, AVANGAR se fit écraser, 16-06 / 16-05, décrochant le triste record du nombre de rounds le plus bas jamais inscrit par un finaliste.
Astralis à Berlin 2019, c’est une mise au point. On croyait les Danois sur le déclin, que nenni. Un mois de vacances leur aura suffi pour se remettre les idées en place et reconstruire un jeu quasiment imbattable. Si l’on était critique culturel, on pourrait arguer que c’était le Major de la maturité. Ici, on se contentera de dire que pour la troisième fois de suite, Astralis cassa des bouches lors du plus grand tournoi de l’année et que personne ne trouva la solution pour garder ses dents intactes.
Le parcours d'Astralis (dupreeh, device, Xyp9x, gla1ve, Magisk) Ronde suisse (Legends Stage) :
Quart de finale :
Demi-finale :
Finale :
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Gambit au PGL Major Krakow 2017
La victoire de Gambit au PGL Major Krakow n’a pas bouleversé la scène. L’équipe n’a pas instauré une période de domination suite à son succès et n’a même jamais eu l’occasion de le faire, laissant partir son meneur un mois plus tard. Pourtant, ce succès est marquant pour deux raisons : parce que ce Major fut l’un des plus barrés de CS:GO tant aucun pronostic initial ne tint la route ; et car il y a une multitude de petites histoires incroyables derrière le titre de Gambit.
Il y a Zeus, évidemment, leader mis dehors par NAVI, qui renonça aux allocations retraite pour s’accrocher à son rêve de gagner un Major, partit reprendre une équipe de Gambit embourbée en bas du Top 10 et la mena sur le toit du monde moins d’un an plus tard avant de revenir, grand seigneur, chez des NAVI qui n’arrivaient plus à faire grand-chose sans lui.
Il y a AdreN, qui a dédié sa vie à ce jeu et se vengeait enfin d’une défaite encaissée douze ans plus tôt en finale des WCG 2005, alors que son équipe de K23, même pas 18 ans de moyenne d’âge, avait (déjà) surpris tout Singapour. Il y a Hobbit, qui allait devenir le meilleur joueur du Kazakhstan à avoir jamais évolué sur Global Offensive, quasiment inconnu à l’époque de son recrutement en même temps que Zeus. Il y a mou, troisième larron du trio kazakh, sniper dont plus personne n’attendait grand-chose, et qui allait pourtant finir top fragger d’une finale de Major, excusez du peu. Et puis il y a Dosia, sacré Dosia, tout le monde avait oublié qu’il avait été classé quatrième meilleur joueur du monde quatre ans plus tôt et qu’il n’était pas juste un meme à la connotation pas toujours très catholique.
La victoire de Gambit au PGL Major Krakow, c’est celle de l’abnégation, du sacrifice, de cinq joueurs qui ont su profiter d’une opportunité qui ne se représenterait jamais. C’est aussi une ronde suisse parfaite, un quart de finale solide contre fnatic, une fin de match à suspense contre Astralis en demie et des mains qui tremblent un peu moins que celles de l’autre surprise Immortals en finale. Une grenade de Dosia, un clutch d’Hobbit, un dernier frag de Zeus, et le récit s’achève là.
Allez, une dernière pensée de Zeus pour la route, tirée de son autobiographie, et qui résonne peut-être encore plus fortement dans le contexte géopolitique actuel : "Après qu’on ait battu Astralis, je me suis dit : 'Danya, si ce n'est pas maintenant, alors quand ? Quand y aura-t-il une autre chance ?' Chez NAVI, j’avais déjà joué des finales de Major, mais je n’avais jamais eu un tel pressentiment. Ici, j’ai compris qu’on devait se donner entièrement, aller au-delà de nos capacités, mettre toute notre énergie et notre force dans cette finale, gagner à n’importe quel prix ! Comme sur le champ de bataille, 'pour la patrie', n’abandonne pas ta ville, fais tout ce qu’il faut pour gagner ! Tape-toi la tête contre le mur, crie, fais ce que tu veux – mais ne perds pas la finale !"
Le parcours de Gambit (Dosia, AdreN, mou, Zeus, Hobbit) Ronde suisse :
Quart de finale :
Demi-finale :
Finale :
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Virtus.pro aux Finales SLTV StarSeries V
(La qualité de l'image est loin d'être optimale mais impossible de trouver mieux.
En vidéo, le winning moment est à voir à partir de 51:00 ici.)
La compétition sur CS:GO n’a pas débuté en août 2012, à la sortie du jeu. Elle a commencé quasiment un an plus tard, en avril 2013, lorsque Virtus.pro s’imposa aux Finales SLTV StarSeries V. Avant cela, ce n’était qu’une exhibition de NiP : 10 lans gagnées de suite, 87 cartes remportées consécutivement, et des semblants de miettes laissées à leurs concurrents dans les rares tournois où les ninjas ne s’alignaient pas.
En Ukraine, pour la deuxième édition des StarSeries sur Global Offensive, Virtus.pro a été la première à démanteler le monopole suédois, réussissant là où VeryGames échouait encore et encore depuis de longs mois. Battue quatre fois auparavant sur des scores assez serrés, la line-up russo-kazakho-ukrainienne a riposté de la plus belle des manières en faisant elle aussi tomber NiP quatre fois, en deux jours, sur quatre cartes différentes : 16-14 sur Mirage et 16-10 sur Nuke en finale du winner bracket, 19-15 sur Inferno et 16-14 sur Dust2 en grande finale. À ces quatre travaux herculéens s’ajoutait un 2-0 contre NAVI en ouverture, et les hommes d’ANGE1 avaient ainsi coché toutes les cases pour avoir le droit de soulever la coupe, dans le sillon de leur fratrie très en forme : Dosia au rifle et Fox à l’AWP furent les deux meilleurs joueurs de l’équipe sur cet événement.
Virtus.pro a prouvé au reste de la scène que les NiP n’étaient pas invincibles. Le chemin était tracé et d’autres l’empruntèrent dans les mois suivants : VP encore, puis VeryGames et Astana Dragons. La scène compétitive pouvait désormais réellement exister et ne plus simplement se résumer au triomphe répétitif de la même équipe. La compétition sur CS:GO, la vraie, était enfin née.
Le parcours de Virtus.pro (ANGE1, Dosia, AdreN, Fox, kucher) Demi-finale winner bracket :
Finale winner bracket :
Grande finale :
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Mentions honorables |
Parce que des grandes victoires, il y en a eu plus que dix :
- Dignitas (MSL, k0nfig, Magisk, RUBINO, cajunb) à l'EPICENTER 2016 : L'une des victoires les plus étonnantes dans une compétition à 250 000 $ de cashprize et plus. Dans cet EPICENTER à huit, Dignitas est considérée comme l'une des deux équipes les plus faibles avec HellRaisers. Pourtant, à Moscou, les Danois ne perdent jamais : matchs nuls contre NAVI, G2 et NiP en poules, victoires contre fnatic, NAVI et Virtus.pro en play-offs. Au final, une énorme surprise et un premier trophée pour le Danemark dans un événement aussi bien doté.
- Cloud9 (n0thing, shroud, Skadoodle, autimatic, Stewie2K) aux Finales ESL Pro League S4 (2016) : Une semaine après Dignitas, au tour des États-Unis de goûter aux gros dollars. Cloud9 offre à son pays son succès le plus prestigieux pour l'époque, au nez et à la barbe des Brésiliens de SK qui jouaient à domicile dans un stade pauliste. Là encore, une vraie surprise.
- NAVI (Edward, GuardiaN, seized, flamie, s1mple) à l'ESL One New York 2016 : L'automne 2016 fut décidément très favorables aux grandes premières. Peu de temps avant C9 et Dignitas, NAVI mettait les mains sur le titre important qu'elle attendait tant en l'emportant à l'ESL One New York, après une grosse finale face à Virtus.pro, conclue en overtime de la map 3. Le début d'une période de domination pour la nouvelle équipe de s1mple, pense-t-on. Pas du tout : New York ne sera qu'une lune de miel et ces nouveaux NAVI galéreront pendant quasiment un an avant de se résoudre à effectuer des changements.
- Luminosity (FalleN, fer, coldzera, fnx, TACO) à la MLG Colombus 2016 : Et les Brésiliens explosèrent enfin. En vue depuis plus d'un an, la bande de FalleN courait toujours après un premier sacre. Elle l'obtint au meilleur moment possible, en Major, après des play-offs dantesques contre Virtus.pro, Liquid et NAVI. Six mois plus tard, la même équipe remettait ça à Cologne pour un back-to-back splendide qui fit du Brésil le nouveau point central de l'écosystème CS.
- fnatic (JW, flusha, pronax, olofmeister, KRIMZ) à l'ESL One Cologne 2015 : Le premier doublé en Major de l'histoire de CS:GO. fnatic affirme sa domination sans partage en 2015 en dégoûtant ses adversaires dans le dernier carré : Virtus.pro passe à deux rounds de la victoire mais doit finalement s'incliner en demie, EnVyUs gâche un lead de 14-7 sur la première map de la finale. Personne ne pouvait battre fnatic et ses pauses tactiques dans la cathédrale de Counter-Strike cet été-là.
- Ninjas in Pyjamas (f0rest, GeT_RiGhT, Xizt, draken, REZ) aux IEM Oakland 2017 : Un titre venu de nulle part. NiP passe une année assez nulle, entre absence du circuit Major et résultats mitigés ailleurs. Les IEM Oakland vont être la lumière au milieu de la nuit. Invités en tant que tenants du titre, les ninjas réalisent une semaine parfaite. Ils sortent en tête de leur poule puis battent les deux meilleures équipes du monde, SK et FaZe, pour aller soulever le plateau du vainqueur et devenir la première équipe à défendre avec succès sa couronne dans un IEM sur CS:GO. Complètement irrationnel. NiP, quoi.
- Team Liquid (EliGE, nitr0, Twistzz, NAF-FLY, Stewie2K) aux Finales ESL Pro League S9 (2019) : 75 ans après le Débarquement, les États-Unis conquièrent une nouvelle fois la France. Team Liquid donne à la bannière étoilée sa première victoire sur le sol européen depuis la sortie de Global Offensive. Sept ans d'attente qui en valaient bien le coup : Liquid sort son ex-bête noire Astralis en quart et anéantit les espoirs des Français de G2 en finale, 25-22 sur la quatrième carte, malgré le public montpelliérain qui poussait derrière ses protégés. Et de deux marches franchies pour les Américains sur la route de leur Intel Grand Slam.
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Merci à Elnum pour les bannières