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L'histoire des cartes : Nuke
Counter-Strike est un jeu formidable... qui se joue sur les mêmes cartes depuis 20 ans. Et ce n'est même pas exagéré de dire ça tant les maps récentes ayant tiré leur épingle du jeu sont rares. D'un côté, il est possible de trouver ça lassant et répétitif. De l'autre, on peut aussi se dire que pour durer aussi longtemps, ces cartes doivent vraiment être exceptionnelles. Alors, pour savoir ce qui se cache derrière chacune d'entre elles, pour revenir sur leurs origines et leurs évolutions, voici l'histoire des cartes.
Deuxième épisode : Nuke.
À l'origine, Nuke n'aurait jamais dû accueillir de bombsites. Créée par Jo Bieg, alias MEEEEDIC, un mappeur allemand, Nuke était une carte à otages, avec cs_ comme préfixe et non de_. Ce n'est qu'en novembre 1999, lorsqu'elle sortira officiellement dans le jeu lors de la BETA 4.0, que les fameux sites A et B posés l'un sur l'autre feront leur apparition. C'est ce qu'explique Jo Bieg dans une interview en 2002 :
En fait, Nuke est un très mauvais exemple de création de map. Pas de brouillon, pas d'idée précise. de_nuke a d'abord été cs_nuke. Puis les créateurs de Counter-Strike ont introduit le mode defuse et Jess Cliffe m'a demandé de l'appliquer sur la carte pour qu'ils en aient une de plus de ce style dans leur prochaine mise à jour. Et voilà, c'était fait. Je referais tout si je voulais changer quelque chose. Particulièrement les falaises, je les ai vraiment bâclées. [...] Ça n'a pas été compliqué pour Nuke de devenir une map officielle parce que je n'y ai jamais pensé. C'est juste arrivé. |
La version originale de Nuke est visuellement inspirée du niveau "Tension en surface" d'Half-Life, reconnaissable à ses falaises caractéristiques. Grand fan du jeu dont le troisième opus est secrètement espéré par des milliers de joueurs, Jo Bieg avait d'ailleurs commencé le mapping dessus avant de s'essayer à une map de Counter-Strike. D'où la présence, en plus des falaises, de nombreux autres éléments inspirés d'Half-Life.
À gauche, Nuke sur Counter-Strike 1.6 ; à droite, le niveau "Tension en surface" d'Half-Life |
Le fait que Nuke soit, à la base, une map cs_, explique sans doute pourquoi elle a longtemps été, et continue d'être, très décriée en tant que carte de_. Très orientée vers la défense, elle pouvait très vite devenir un calvaire pour les attaquants qui se retrouvaient satisfaits avec trois ou quatre rounds inscrits à la fin de leur side terroriste. Les maps defuse et otage ne se construisent pas de la même manière et il est très compliqué de simplement ajouter deux bombsites sur une carte qui n'est pas prévue pour en accueillir.
Malgré tout, la carte va être jouée, beaucoup jouée, extrêmement jouée. Tellement jouée que Valve en rachètera les droits pour ensuite l'intégrer à toutes les versions de Counter-Strike jusqu'à la 1.6, version "finale" du premier opus qui sera en vogue pendant quasiment une décennie. Et au fil des années, Nuke ne subira que très peu de changements. Même la version Source n'apportera pas énormément de modifications de fond, seulement des transformations esthétiques. Le désert rocailleux laisse place à un environnement plus urbain, les falaises sont remplacées par d'autres bâtiments. Mais la manière dont la carte est construite ne bouge quasiment pas, si ce n'est que les murs gagnent en solidité (pas bien difficile quand ceux de 1.6 permettaient des wallbangs outranciers).
Il faudra attendre CS:GO pour que la carte commence à se métamorphoser. Nuke est alors entièrement retravaillée, évidemment graphiquement, mais aussi plus en profondeur par Valve et Salvatore Garozzo, alias Volcano. Cet ancien joueur devenu mappeur, créateur de Cache, va activement participer à la refonte de Nuke sur Global Offensive et apporter des changements significatifs.
Le plus important est sans doute le déplacement de l'escafer (pour escalier en fer) qui permet aux terroristes de descendre en B depuis l'extérieur. Auparavant situé derrière le MAC, il était difficile d'accès. Volcano va l'avancer à sa position actuelle pour le rendre plus facilement prenable et offrir davantage de solutions à l'attaque.
Auparavant très loin, derrière le mac, l'escafer va être rapproché et prendre le nom de Volcano (du nom de celui qui en a eu l'idée) ou Secret |
D'autres transformations sont aussi à prendre en compte. Le toxic devient une petite pièce mineure en B et n'est plus relié à l'antitox ou à l'entrée des conduits. Une grande majorité d'objets présents sur les BP (barils, caisses, chariot élévateur en A) sont supprimés. De manière globale, la map est épurée et simplifiée avec, déjà, l'objectif de (au moins un peu) la rééquilibrer.
Dans les faits, il n'en sera presque rien. Nuke reste encore et toujours la map de la défense, et aussi par conséquent la map des comebacks. Pendant deux ans et demi, la situation restera comme ça. À quelques réglages de bugs près, la version originale de Nuke sur CS:GO ne bouge pas et continue d'accumuler les critiques. Adorée par certains pour son unicité, détestée par d'autres pour son déséquilibre et la confusion sonore qui y règne, elle sera souvent boudée par les pros, à l'exception de quelques équipes qui en avaient fait leur maison, NiP étant le plus fameux exemple.
De manière générale, je pense que Nuke est une carte très sous-estimée. C'est une map très intéressante en raison de sa construction, elle est très différente des autres cartes et unique. Mais le truc, c'est que les équipes sont soit très fortes dessus, soit très moyennes voire mauvaises. Et celles dans la deuxième catégorie représentent 70 à 80 % du total... Et celles qui sont très fortes dessus vont voir la map être bannie à chaque fois car elles sont sûres de gagner à 100 % si elles la jouent. NBK |
Pour l'anecdote, avant son retrait en 2015, Nuke sera la seule carte de tout le map pool à n'avoir jamais été jouée en finale de Major. Il faudra attendre 2017 et sa nouvelle version pour voir Astralis et Virtus.pro batailler dessus lors de l'ultime confrontation de l'ELEAGUE Major 2017.
Kernkraftwerk Harz = centrale nucléaire d'Harz |
Parce que oui, Nuke va donc finir par subir un lifting total au printemps 2015. La centrale nucléaire déménage et quitte sa localisation historique d'Harz, en Allemagne (d'ailleurs visible sur le premier badge Nuke émis par Valve). Elle refait surface aux États-Unis, dans la région de Rust Belt. L'esthétique, les couleurs, les textures et la majorité des décors sont complètement revus. L'organisation générale de la map reste similaire mais de nombreux éléments de sa structure évoluent : certains passages sont agrandis, d'autres sont rendus plus faciles d'accès, comme le silo. La passerelle extérieure se prolonge désormais sur tout le pourtour du bâtiment, une partie des poutres intérieures est rendue inaccessible, l'une des entrées des conduits est condamnée.
Nuke se transforme, et ce n'est que le début. Cette nouvelle version va subir plus de modifications en deux ans sur CS:GO qu'en neuf ans sur CS 1.6. Étendue, la passerelle extérieure va ensuite être complètement enlevée. Les conduits se font plus labyrinthiques, les spawns s'avancent, le toxic disparaît entièrement... Les mappeurs de Valve travaillent dur pour que la communauté et les joueurs pros se mettent à apprécier la map, encore souvent critiquée.
Il faut dire qu'être une carte à otages, à la base, ça n'aide pas.
Pour conclure, comme pour Dust2, quelques moments mémorables arrivés sur cette carte. Ça tombe bien, il y a déjà un article dédié à ça. Mais en voilà d'autres, pour compléter :
- GeT_RiGhT qui colle des headshots venus de nulle part, au TEC-9 ici et à l'AK-47 là
- Le 1vs5 de cash lors du match mousesports vs mTw lors des IEM Global Challenge Gamescom, en 2009
- L'un des premiers exemples connus de "fake flash" par HeatoN en 2002
- Le round d'éco de mouz face à SK à la CPL Winter 2003, qui a appris aux Suédois qu'il ne fallait jamais faire les malins en jettant ses armes en l'air, même contre une éco
Merci à Neysta pour la bannière